C’est de la région du nord du Togo, limitrophe du Bénin, que viennent
ces belles cases rondes au toit de chaume. Ce sont les maisons typiques
d’une ethnie appelée les Tamberma (un nom qui signifie "bon maçon"),
sans doute implantée dans cette région vers le XVIe siècle, en
provenance du Burkina Faso.
Les Tamberma, qui sont également connus sous le nom de Bétammaribé du
Togo, seraient les lointains descendants d’un empereur Mossi,
Mogho-Naba. L’Afrique, on l’oublie souvent, a compté de puissants
royaumes pendant son "Age d’Or", entre les Xe et XVe siècles, mais son
organisation traditionnelle a été progressivement déséquilibrée par les
contacts avec Occident et Islam. Selon certaines sources, les Tamberma
se seraient expatriés par refus de se laisser dominer par l’islam; mais
peut-être ont-ils dû tout simplement chercher de nouvelles terres à
cause d’une famine.
En tout cas, ce qui caractérise leurs villages, outre la parfaite
régularité des constructions, c’est la coexistence, voire
l’interpénétration des activités des vivants et des esprits sacrés,
invisibles mais puissants. On le voit bien, là-bas, dans les cultures au
milieu desquelles des îlots sauvages sont laissés en friche depuis des
temps immémoriaux; dans les maisons, il est plus malaisé de distinguer
l’influence du sacré, mais elle existe et imprègne les mentalités. La
maison, ou plutôt le foyer familial, compte énormément chez les
Tamberma. Elle s’appelle tékyênté: c’est cette case ronde de terre et de
paille, avec ses sortes de tourelles adossées, qui sont des chambres et
la cuisine, contiguë à une pièce d’eau, avec une évacuation directe
vers l’extérieur. Du dehors, on dirait un peu un château-fort, avec une
entrée unique. C’est effectivement une protection contre les dangers de
l’extérieur, de même qu’une protection contre les chaleurs du jour. La
maison tamberma n’ayant qu’une ouverture, il y fait sombre, donc plus
frais. L’air circule dans un seul sens, apportant le soir sa fraîcheur
et emmenant avec lui, en sortant, la fumée du feu. Les murs n’absorbent
que peu la chaleur en raison de l’inertie thermique de la terre des
parois. A l’intérieur, le rez-de-chaussée est réservé aux animaux et aux
esprits des disparus, les occupants vivant au premier étage, dans les
chambres qui donnent sur une terrasse principale. La coutume veut qu’on
entre et sorte des chambres à reculons, pour ne pas être surpris en
tournant le dos. Au sol, des cônes de terre intriguent: certains d’entre
eux sont des greniers à même le sol, d’autres sont en fait des autels
de prière, pour les vivants comme pour les esprits. La partie sud de la
maison est considérée comme masculine, celle qui est au nord, féminine.
Il y a toujours un tekyênté plus important et plus grand que les autres,
c’est le foyer ancestral.
Des études très fouillées (*) ont été consacrées à l’organisation
sophistiquée des maisons Tamberma, conçues selon les besoins d’un peuple
qui, le jour, vit dehors et se retrouve le soir dans le foyer familial.
L’Artisan de Pairi Daiza a choisi cette forme d’architecture, aussi
intéressante que celle des demeures du peuple Dogon, pour illustrer le
raffinement - dans la simplicité - de formes répondant parfaitement à
leur fonction. Mais, dans ces maisons, vous trouverez aussi quantité
d’objets usuels provenant d’autres pays africains, comme des objets
consacrés du culte du Vaudou, originaire du Bénin et du Dahomey avant
d’avoir conquis Haïti, notamment, avec les malheureux esclaves africains
importés dans les îles.
TEXTE: Pairi Daiza (site officiel)