dimanche 2 décembre 2012

Le village Tamberma

C’est de la région du nord du Togo, limitrophe du Bénin, que viennent ces belles cases rondes au toit de chaume. Ce sont les maisons typiques d’une ethnie appelée les Tamberma (un nom qui signifie "bon maçon"), sans doute implantée dans cette région vers le XVIe siècle, en provenance du Burkina Faso.
Les Tamberma, qui sont également connus sous le nom de Bétammaribé du Togo, seraient les lointains descendants d’un empereur Mossi, Mogho-Naba. L’Afrique, on l’oublie souvent, a compté de puissants royaumes pendant son "Age d’Or", entre les Xe et XVe siècles, mais son organisation traditionnelle a été progressivement déséquilibrée par les contacts avec Occident et Islam. Selon certaines sources, les Tamberma se seraient expatriés par refus de se laisser dominer par l’islam; mais peut-être ont-ils dû tout simplement chercher de nouvelles terres à cause d’une famine.
En tout cas, ce qui caractérise leurs villages, outre la parfaite régularité des constructions, c’est la coexistence, voire l’interpénétration des activités des vivants et des esprits sacrés, invisibles mais puissants. On le voit bien, là-bas, dans les cultures au milieu desquelles des îlots sauvages sont laissés en friche depuis des temps immémoriaux; dans les maisons, il est plus malaisé de distinguer l’influence du sacré, mais elle existe et imprègne les mentalités.  La maison, ou plutôt le foyer familial, compte énormément chez les Tamberma. Elle s’appelle tékyênté: c’est cette case ronde de terre et de paille, avec ses sortes de tourelles adossées, qui sont des chambres et la cuisine, contiguë à une pièce d’eau, avec une évacuation directe vers l’extérieur. Du dehors, on dirait un peu un château-fort, avec une entrée unique. C’est effectivement une protection contre les dangers de l’extérieur, de même qu’une protection contre les chaleurs du jour. La maison tamberma n’ayant qu’une ouverture, il y fait sombre, donc plus frais. L’air circule dans un seul sens, apportant le soir sa fraîcheur et emmenant avec lui, en sortant, la fumée du feu. Les murs n’absorbent que peu la chaleur en raison de l’inertie thermique de la terre des parois. A l’intérieur, le rez-de-chaussée est réservé aux animaux et aux esprits des disparus, les occupants vivant au premier étage, dans les chambres qui donnent sur une terrasse principale. La coutume veut qu’on entre et sorte des chambres à reculons, pour ne pas être surpris en tournant le dos. Au sol, des cônes de terre intriguent: certains d’entre eux sont des greniers à même le sol, d’autres sont en fait des autels de prière, pour les vivants comme pour les esprits. La partie sud de la maison est considérée comme masculine, celle qui est au nord, féminine. Il y a toujours un tekyênté plus important et plus grand que les autres, c’est le foyer ancestral.
Des études très fouillées (*) ont été consacrées à l’organisation sophistiquée des maisons Tamberma, conçues selon les besoins d’un peuple qui, le jour, vit dehors et se retrouve le soir dans le foyer familial. L’Artisan de Pairi Daiza a choisi cette forme d’architecture, aussi intéressante que celle des demeures du peuple Dogon, pour illustrer le raffinement - dans la simplicité - de formes répondant parfaitement à leur fonction. Mais, dans ces maisons, vous trouverez aussi quantité d’objets usuels provenant d’autres pays africains, comme des objets consacrés du culte du Vaudou, originaire du Bénin et du Dahomey avant d’avoir conquis Haïti, notamment, avec les malheureux esclaves africains importés dans les îles. 

TEXTE: Pairi Daiza (site officiel)